De profundis clamavi
Louis
Tu es venu à moi. Tu as trouvé la faille de cette muraille bâtie au fil des ans qui protégeait mon cœur des attaques extérieures, de ces sentiments emprisonnés au fond de mon âme.
Mais tout s'est écroulé.
Un regard, une voix, un sourire, une sensation, une étreinte; et me voilà sans défense et à ta merci. Et tu l'as su car je te l'ai dit. J'ai tenté de décharger ce lourd fardeau qui me pesait, un amour naissant, une fleur qui s'ouvre.
Je m'offre.
Mais de suite la lumière, ta lumière qui m'aveugle. Je ne vois plus rien, j'écoute juste la voix de mon cœur, tu me guides.
Je te veux.
Rien d'autre n'existe que cette envie : Toi.
A défaut de beaux sentiments, je me contentais de ton corps, moments bénis entre tous où j'ai cru t'avoir en ma possession. Plus rien ne comptait à part toi.
J'étais fermée à tous les conseils de mes amis, leurs avis et les mises en garde conscientes de mon fort intérieur.
L'art de nier les évidences.
Mélancolie.
Et maintenant j'accuse le contre-coup car je reste seule avec moi-même. Ton corps ne me distrait plus, ne m'éloigne plus de mes anciennes peurs et de ces angoisses omniprésentes.
La chute libre.
Tu n'es plus là.
Je n'ai même plus le réconfort de ta voix, de tes mots si neutres soient-ils.
Pourquoi ne me rassures-tu pas?
J'ai besoin de ta tendresse, de cette présence qui apporte un peu de chaleur à un cœur troublé et perdu.
Je doute.
Et toi ingrat tu me laisses douter.
Je ne veux pas voir la certitude qui s'impose à mon esprit car ça fait mal, trop mal. Je préfère rester dans cet état, à demi éveillée.
Rires et pleurs comme les masques de théâtre.
Je monte si haut pour retomber si bas.
Statuette de verre dans tes mains de géant. Marionnette paisible faite de bois mais dont le sang chaud circule dans ses veines de marbre et irrigue un cœur qui ne bat que pour toi.
Toi seul.
Toujours toi.
J'attends impassible le coup de grâce, impuissante. Je suis lasse de ce jeu muet.
Ou alors est-ce moi qui reste sourde et aveugle?
Que veux-tu me dire?
Que dois-je comprendre?
Que dois-je faire? Où aller?
Ne me laisse pas ! Tu m'as prise par la main, tu m'as emmenée dans une contrée magnifique et inconnue mais le soleil s'est couché.
La nuit est noire, les étoiles ne brillent plus.
Je suis entourée d'un brouillard épais. Ta chaude main n'est plus posée sur mon épaule.
Tu m'as égarée.
J'avance à tâtons, j'ai froid, mes larmes ne me réchauffent pas, elles m'aveuglent et ma gorge se serre. Je ne peux plus crier, j'étouffe !
Allume ta lanterne. Reviens me chercher. Ne laisse pas ces fantômes m'envahir. Ne laisse pas mon sang se figer et les aiguilles de l'horloge s'arrêter.
Depuis longtemps tout n'est que vide, froid, silence et glace. Tu as frappé trop fort mon ange. Et pourtant je ne t'en veux pas.
Je t'aime assez pour te haïr mais trop pour m'en convaincre.
J'avais ouvert la porte de mon coeur pour toi seul. Tu es entré, tu as détruit et tu es parti en me laissant là.
Joues baignées de larmes et mains ensanglantées aux prises avec les morceaux de verre du miroir que tu as brisé.
Que l'illusion était belle. Trop beau pour être vrai, n'est-ce pas là l'expression de rigueur?
Tu m'as fait entrevoir un bout du Paradis mais c'était pour mieux m'entrainer en Enfer.
Un doigt posé sur mon épaule, une simple pression de ta main et je suis tombée.
"J'implore ta pitié, Toi, l'unique que j'aime,
Du fond du gouffre obscur où mon coeur est tombé.
C'est un univers morne à l'horizon plombé,
Où nagent dans la nuit l'horreur et le blasphème ;
Un soleil sans chaleur plane au-dessus six mois,
Et les six autres mois la nuit couvre la terre ;
C'est un pays plus nu que la terre polaire ;
- Ni bêtes, ni ruisseaux, ni verdure, ni bois !
Or il n'est pas d'horreur au monde qui surpasse
La froide cruauté de ce soleil de glace
Et cette immense nuit semblable au vieux Chaos ;
Je jalouse le sort des plus vils animaux
Qui peuvent se plonger dans un sommeil stupide.
Tant l'écheveau du temps lentement se dévide !"
Du fond du gouffre obscur où mon coeur est tombé.
C'est un univers morne à l'horizon plombé,
Où nagent dans la nuit l'horreur et le blasphème ;
Un soleil sans chaleur plane au-dessus six mois,
Et les six autres mois la nuit couvre la terre ;
C'est un pays plus nu que la terre polaire ;
- Ni bêtes, ni ruisseaux, ni verdure, ni bois !
Or il n'est pas d'horreur au monde qui surpasse
La froide cruauté de ce soleil de glace
Et cette immense nuit semblable au vieux Chaos ;
Je jalouse le sort des plus vils animaux
Qui peuvent se plonger dans un sommeil stupide.
Tant l'écheveau du temps lentement se dévide !"