Monogamie et biologie

 

Tiré du livre "Vertus du polyamour" d'Yves-Alexandre Thalmann.

 

 

"Le fait qu'autant de personnes cèdent aux élans de l'amour et vivent leur passion exclusive de manière semblable plaide en faveur de mécanismes innés. Les recherches en neurobiologie ont d'ailleurs déjà mis à jour certains processus ayant lieu dans le cerveau amoureux : il apparaît ainsi que des endorphines, ou hormones naturelles du plaisir, sont libérées en présence de l'être aimé. La sensation agréable procurée par ces endorphines, comme toutes les sensations de plaisir, va générer une sorte de dépendance : une fois l'effet de bien-être dissipé, l'amoureux n'aura de cesse de retrouver cet état plaisant.

 

L'amoureux est en quelque sorte un drogué de l'amour, recherchant en permanence les sensations dues à la présence de l'Autre. Un autre à qui il finit par s'attacher sous l'influence de l'ocytocine, une molécule (notamment libérée au moment de l'orgasme) capable d'induire un effet global de bien-être en contrecarrant les hormones du stress.

 

A ce stade, il est clair que l'état amoureux se vit le plus souvent dans l'exclusivité  on tombe généralement amoureux d'une seule personne à la fois. On sait comment cela fonctionne, du moins en partie, mais sait-on pourquoi il en est ainsi? Les théories de l'évolution permettent de donner une première réponse : il en va de la survie de l'espèce !

 

En effet, cette survie est liée à la reproduction de ses membres. L'acte sexuel doit donc impérativement avoir lieu. C'est pour cela que la pulsion sexuelle et l'acte "copulatoire" sont profondément enracinés dans les gènes des espèces sexuées, y compris la nôtre. Voilà en définitive ce qui est naturel pour leurs membres : trouver un partenaire, pratiquer le coït et se reproduire. Mais ce n'est pas suffisant pour la perpétuation de l'espèce humaine, car le petit homme naît immature. Livré à lui-même, il n'aurait aucune chance de survie. Il est totalement dépendant d'individus qui doivent s'occuper de lui, principalement ses géniteurs.

 

Or, la grossesse et la période postnatale sont éprouvantes pour les femmes, qui voient leurs capacités physiques fortement diminuées. Ainsi, en actionnant un sentiment amoureux exclusif destiné à attacher les deux géniteurs l'un à l'autre, la nature a permis d'augmenter les chances de survie des petits, grâce à l'apport des ressources du mâle.

 

La monogamie a donc bien des fondements biologiques. En bref, d'un point de vue strictement biologique, l'exclusivité du sentiment amoureux est une ruse de l'évolution pour augmenter les chances de survie des membres de l'espèce humaine.

 

Même si cela paraît très peu poétique et encore moins romantique, une donnée de l'expérience vient confirmer ce propos : le sentiment amoureux fort et exclusif (on ne parle pas ici d'amour, mais uniquement de l'état amoureux, caractérisé par une obsession pour le partenaire, une sorte d'aveuglement à son propos, un fort besoin de s'unir à lui et de rechercher sa présence) n'est pas programmé pour durer au-delà de trois ans, le temps nécessaire à la femme pour retrouver son autonomie et au petit pour se développer suffisamment. Cette durée réduite de la passion amoureuse est du reste confirmée par les sondages : 18 à 36 mois en moyenne.

 

Est-ce dire que nos gènes nous poussent à être des serial monogamists, des monogames en série? Notre constitution génétique nous prédispose à tomber amoureux et à nous attacher momentanément à un seul partenaire. Mais pourquoi rêvons-nous de transformer un état passager en projet de vie? Une explication réside dans un autre mécanisme biologique : la recherche du plaisir. L'intensité des sentiments amoureux transporte les amants hors du monde quotidien : ils vivent des moments exceptionnellement riches et très stimulants, voire extatiques. Ils aimeraient par conséquent que cette béatitude dure le plus longtemps possible. Comme l'amoureux attribue ce bien-être à la présence de l'être aimé, il en conclut qu'il souhaite passer sa vie entière à ses côtés afin de continuer à éprouver autant de bonheur.

 

On connaît la suite de l'histoire : les élans perdent en impétuosité, les premiers signes de lassitude apparaissent, les petits défauts de l'autre se font de plus en plus présents (et pesants), les soucis quotidiens reprennent le dessus. Deux issues à cette épreuve de réalité : quitter l'autre et chercher un nouvel amour - le Grand Amour - qui réactivera ces instants délicieux, ou alors s'accomoder de sentiments plus calmes et plus tièdes... et rester avec lui."

 

 

On m'annonce dans l'oreillette que Blanche-Neige et Cendrillon menacent de se jeter du haut du trente-deuxième étage de leur résidence secondaire...



21/04/2008
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